Quand la Chine t'offre 72h d'escale (2018)

Samedi 19 mai 2018

 

Je quitte la Malaisie pour la toute première fois depuis 13 mois… Mon sac à dos est plein à craquer : sac de 60 litres sur le dos, ordinateur en bandoulière et petit sac que je porte devant. Chaussures de marche aux pieds, je me rends à l’aéroport en Grab (l’équivalent malaisien d’Uber). Je pars bien à l’avance histoire de ne pas louper mon vol : direction Pékin !

Après deux vols et une escale à Kuala Lumpur, j’atterris enfin dans la capitale chinoise près de 12h plus tard. L’avion est rempli de chinois qui parlent fort et se bousculent… Ça Promet. Nous roulons plus de 20 min sur le tarmac après avoir atterri, l’aéroport doit être immense ! 

 

On m’avait prévenu, mais je m’en rends compte immédiatement : les chinois ne comprennent rien à l’anglais. J’ai du mal à me faire comprendre et ça n’est qu’à 2h du matin que mon taxi démarre, direction l’adresse donnée par ma Couchsurfeuse (réseau d’hospitalité permettant d’offrir le gite aux voyageurs).

 

Je ne sonne chez Zhouyi qu’à près de 3h du matin, navrée d’une arrivée si tardive (je l’avais quand même prévenu au préalable). Mon hôte est ou bien très fatiguée, ou bien pas aimable de nature. Elle me lâche deux couvertures et un oreiller sur la moquette de sa chambre en me disant “c’est pour faire ton lit”... Bon, ça promet. Ayant décidé de partir explorer la Grande Muraille de Chine dès le lendemain, je demande à Zhouyi de me donne rapidement la direction du bus en m’asseyant à côté d’elle sur son lit. Malheur, j’ai cru qu’elle allait faire une syncope ! Mon hôte me demande de me relever et glisse un coussin sous mes fesses… J’hésite entre rire et pleurer. On se met finalement au lit (au sol pour moi) pour une courte nuit. 

 

Dimanche 20 mai 2018

 

7h45 : le réveil sonne, Zhouyi à cours. Tant mieux, ça me fera une journée complète d’exploration. Je pars de l’appart à 8h avec mon petit sac, direction le métro. Je suis étonnée de découvrir une Chine propre, ordonnée, silencieuse… Même les scooters semblent rouler à l’électricité ! On est bien loin de l’image brouillonne que je me faisais de Pékin. 

 

 

4 métros et 27 personnes arrêtées pour demander mon chemin (en vain puisque personne ne parle anglais) j’arrive enfin à la station de bus. Je grimpe dans le 190 pour la modique somme de 15 yuans. Puis sombre dans un sommeil profond… Jusqu’à ce que j’entende quelqu’un me crier “这是你必须下车的地方” en me faisant le geste de descendre. Surprise, j’agrippe mon sac et sors précipitamment. Je n’aurais pas dû, nous ne sommes à priori pas encore arrivés ? Je me vois donc obligée de filer 10 yuans à un chauffeur de taxi peu scrupuleux qui me fait parcourir à peine 1km. Je grimpe ensuite dans le bus 25 pour 13 yuans : nous roulons 1h30 entre grosses villes, autoroute et campagne. Le nez collé à la fenêtre, j’ai l’impression que nous prenons de l’altitude, le paysage devient plus vert et vallonné. Comme à mon habitude, j’ai décidé de m’éloigner de Pékin pour découvrir une section de la muraille très peu fréquentée des touristes (à 130 km au nord-est de la capitale, quand le premier point d’entrée est à moins de 70 km).

 

Finalement, le chauffeur du bus me fait le geste de descendre. Je m’exécute et me retrouve avec deux locales cinquantenaires avec qui nous faisons un bout de chemin à pied. Elles ne comprennent rien à l’anglais et je ne parle toujours pas chinois : grâce à Google Traduction, elles finissent par comprendre ce que je fais là (non sans étonnement) et m’indiquent une vague direction. Je marche sans savoir vraiment où aller : en rase campagne, dans un pays que je “connais” depuis à peine 12h, il n’y a pas âme qui vive, je n’ai évidemment pas accès à Internet, et commence à douter… J’ai toujours été très aventureuse, sans crainte, à suivre mon instinct, mais là… J’avoue me sentir un poil démunie ! 

 

Finalement, après plus d’une heure de marche, je tombe enfin sur des panneaux indiquant la muraille. Rassérénée et excitée, je hâte le pas, puis la vois… Elle est là, qui s’étend à perte de vue. Submergée par l’émotion, je lâche une petite larme tout en crapahutant vers l’ouest pendant plus d’une heure (25 yuans de droit d’entrée). Nul besoin d’attendre le coucher du soleil, le ciel est couvert. Je décide donc de redescendre au petit village de pierre et m’établir dans le seul restaurant pour un plat de nouilles et une chambre. Le gérant semble heureux d’avoir de la visite, nous échangeons quelques mots autour d’une bière, puis je sombre…

 

Lundi 21 mai 2018

 

5h du matin, mon réveil sonne ! Je saute dans mes chaussures de marche avec hâte, j’ai décidé de rejoindre Jinshanling depuis Gubeikou où j’ai passé la nuit. C’est, paraît-il, la section la moins touristique de la muraille : certaines portions n’auraient jamais été restaurées depuis leur construction initiale…

 

Les 11 km sont engloutis en trois heures : 1h de marche sur la section de Gubeikou (en très mauvais état / escarpée), 1h de marche dans la campagne en faisant un gros détour (car le mur est en ruine), 1h de marche sur la section de Jinshanling (extrêmement bien conservée / rénovée). Le trek n’est pas facile : un fort dénivelé puisque nous sommes en basse montagne, des crêtes à pic, des tours de guet à escalader... J’ai parfois le vertige, d’autant qu’un épiais brouillard s’est installé, m’empêchant de pleinement profiter du panorama qui s’étend à perte de vue. Mais ça donne un côté mystique pas désagréable, et quel plaisir de découvrir l’une des sept merveilles du monde moderne sans aucun touristes… Je n’en crois pas mes yeux, j’ai la Grande Muraille de Chine pour moi toute seule !

 

Je quitte finalement la muraille à regret, mais épuisée. Il faut dire que je n’ai rien mangé depuis la veille et ma petite soupe de nouilles... La découverte de Jinshanling me laisse sans voix : je me retrouve nez à nez avec des caméras, des hauts parleurs diffusant des chansons chinoises, de petites guérites de bouffe, des magasins de souvenirs et même un immense hôtel de luxe en construction… Quelle horreur, on se croirait chez Disneyland ! D'ici à quelques années, l’endroit sera certainement bondé, et c’est bien dommage. Je fuis en direction d’une station de bus, et marche encore… Plus de deux heures, en vain. L’arrêt de bus est introuvable et une fois n’est pas coutume, personne ne me comprend. Épuisée, je décide de faire ce que je fais de mieux : du stop. Même sans l’avoir planifié, je me retrouve pouce tendu, et j’adore ça ! Très facilement, je prends place dans une première voiture, puis une deuxième, mes chauffeurs amusés et heureux de me faire parcourir quelques kilomètres. 

 

En un rien de temps, me voici dans la banlieue de Pékin, à un arrêt de bus, puis sur la place Tien An Men, sous une pluie battante. Je fais face à ce que je pense être la Cité Interdite et me promet de lire à ce sujet lorsque j’en aurai la possibilité, car je ne connais rien à l’histoire de la Chine. Je sais juste que ce gigantesque portrait au-dessus de l’entrée ne représente autre que Mao Zedong. 

 

Je rejoins Zhouyi, mon hôte, dans un centre commercial en début de soirée. Cette dernière m’y annonce qu’elle est débordée de travail et que nous nous verrons à 22h chez elle. Déçue, je me demande encore une fois pourquoi elle fait du Couchsurfing alors qu’elle n’en a définitivement pas l’état d’esprit. Épuisée, mais heureuse de ma journée, je décide de chercher de la bonne compagnie avec qui partager une bière. Et je marche, encore, jusqu’à atteindre un quartier vivant. J’y repère un jeune occidental et un quarantenaire africain qui partagent une table, mais semblent ne pas se connaitre, c’est parfait. N’ayant rien à perdre et du temps à tuer, je leur demande gentiment si je peux me joindre à eux : Roberto est italien et fait un doctorat en Chine, Landres est un diplomate de la Sierra Léon qui a grandi aux États-Unis. Nous passons un agréable moment à discuter de notre pays d’accueil et de voyage au rythme des bières qui défilent. 

 

Mardi 22 mai 2018

 

Rentrée tard, levée tôt : c’est le grand jour ! Celui de mon premier retour en France depuis que je suis expatriée en Malaisie, soit plus d’un an. Dans le métro en direction de l’aéroport (25 yuans, le métro pékinois n’a plus de secrets pour moi) je fais un bilan de mon séjour : absolument génial ! Les locaux sont super gentils, aidants et prévenants malgré la barrière de la langue. Rien à voir avec les touristes chinois qui débarquent en masse à Paris ou Bornéo.

 

 

Je reviendrai et explorerai plus de cet immense pays, c’est une certitude !